Une escapade de nuit ... [Pv]

Il faisait nuit. D’une de ces nuits froides qui glace le sang, qui fait monter la chair de poule sur toute les parcelles de peau exposées au vent. Un vent brut, peu commode, qui giflait la nature, cinglait les vitres de l’académie avec une ardeur effrayante. Une légère pluie tombait aussi, emportée par les rafales, et venant s’écraser sur les flanc de l’internat, ou sur les élus ayant eu le courage de mettre les pieds dehors par un temps pareil.

Sakura regardait la nature se déchaîner dans l’obscurité de la nuit. Devant une porte entre ouverte sur un sentier, elle écoutait les arbres secoués. Dehors, elle voyait l’herbe être animée par de violentes secousses, si bien qu’elle n’osa pas mettre un pied à l’extérieur. L’atmosphère orageuse qui régnait sous ses yeux l’angoissait un peu : il avait fait un temps similaire lorsqu’elle avait été frappée par la foudre, une dizaine d’années auparavant. Et même si la foudre était son élément –devenu favoris, depuis tout ce temps- elle revoyait toujours cet épisode maudit de sa vie. Une vie écourtée par une brève perte de mémoire, qui lui grappillait tout de même son enfance et les souvenirs qu’elle avait nourri pendant ces maigres années d’existence. Le temps s'adoucissait. Déjà, la pelouse se calmait, la pluie avait cessé de tomber le vent s’était transformé en une brise plutôt agréable. Sakura n’aimait pas les sautes d’humeur du temps. Et bien qu’elle poussait déjà la porte pour s’engouffrer dans le froid extérieur, elle espérait qu’il n’allait pas se fâcher à nouveau.

La lune s’imposait dans le ciel, maintenant. Elle éclaircissait les terres de Shima, rejetait les nuages gris. Les étoiles, elles aussi, arrivaient timidement, peuplant cette étendue de peinture bleu foncée, noire par endroit. Sakura marchait de son pas rapide et fluide sur un sentier. Et de toute évidence, elle savait où elle allait : dans les bois. C’était un endroit qui lui avait paru beau, lorsqu’elle l’avait vu de loin, le premier jour de son arrivée. Elle était nouvelle en ces lieux, mais elle s’était déjà bien intégrée, et elle avait enregistré le chemin le plus aisé pour se rendre dans cette forêt.

L’amnésique pénétra entre les arbres, et vit tout de suite que la luminosité était plus réduite. Les feuillages ne laissait pas l’accès aux rayons de lune, si bien que la jeune fille devait ralentir son allure, marcher à l’aveuglette, le temps que ses yeux s’habituent à l’obscurité qui se faisait de plus en plus pesante, au fur et à mesure qu’elle avançait. Elle tâta devant elle, trouva un arbre, puis aperçu une petite clairière de cerisiers. Elle n’était pas sûr que c’était bien ça, mais elle s’était remise à marcher vite, ignorant les ronces qui griffaient, de temps à autre, mains nues qui se baladaient devant elle comme cherchant un éventuel obstacle. Sakura arriva au cœur même de la clairière, observa de ses yeux argent les arbres presque nus qui l’entourait. Ils n’étaient pas fleuris, mais ils étaient beaux quand même. Un sourire éclaira le visage pâle de l’adolescente, signifiant qu’elle se sentait bien. Oui, mais elle aurait été sans doute plus à l’aise si ce bruit incessant de feuilles craquées ne l’avait pas suivie tout au long de sa progression…

Invité

Le crépuscule approchait quand le ciel, jusqu’alors
de la même teinte que le saphir, fut envahit par une épaisse couverture
nuageuse grisâtre. Peu après, la pluie s’était invité, un crachat plus qu’une
averse, mais tout de même assez intense pour percer le couvert des arbres du
bois de Shima. Wilem revenait d’une promenade au lac quand le temps se gâta, il
haïssait la pluie et, bien qu’il ne se
trouvait plus qu’a quelques centaines de mètre du pensionnat, il avait préféré
grimper à un solide chêne pour s’abriter sous son feuillage encore verdoyant à
cette saison. Il s’assit tant bien que mal sur une large branche et s’adossa
contre le tronc à l’écorce rugueuse. Fatigué de sa journée, et malgré
l’inconfortablement de sa position, il finit par s’endormir. Puis il se mit à
rêver.

« Il marche dans l'herbe verte, les cheveux au vents, les mains dans les poches, les
yeux scintillant de joie. A sa droite,
les clapotis d'un ruisseau reflétant
l'azur des cieux. A sa gauche, une immense étendue émeraude ondulant au
rythme des douces bourrasques de vent. Loin devant lui s'élève un gigantesque
arc-en-ciel, sa base disparaît derrière la paroi d'une grande falaise
rocailleuse. Un autre bruit vient maintenant se mêler au sons apaisant de la
nature qui s'épanouit, le fracas d’une chute d’eau, une immense cascade se
jetant avec force dans un petit lac à l'eau miroitante, éclaboussant le
périmètre de centaine de petits nuages d'écume. Il observe ce décor
paradisiaque, scrutant la moindre parcelle de ce paysage enchanteur, il
l'aperçoit enfin. De la marche lente il passe à la marche rapide, de la marche
rapide à la course, de la course au sprint. Un grand sourire illumine son
visage à la jeunesse éclatante, il franchit enfin les derniers mètres et chacun
se jettent dans les bras de l'autre.

Elle est jeune, le même age que lui vraisemblablement, un visage enfantin supporté
par une silhouette menu. Une belle cascade de cheveux blonds enjôleurs et
soyeux encadre un ovale souriant. Des lèvres rosées, un nez fin et des grands
yeux verts ou se disputent malice et sincérité. Dans un fouillis de bras et de
jambes, les deux amants s'effondrent dans un éclat de rire tonitruant et, comme
deux gamins, commencent à se rouler dans la pelouse fraîche. »

Ses paupières tremblent doucement puis ses yeux s’ouvrent. Il avait vaguement
entendu un faible son en bas. Sans faire de gestes brusques, il se penche
soigneusement dans le vide pour apercevoir le responsable de son réveil. C’est
une élue. Il ne l’a jamais aperçu auparavant mais perçoit son pouvoir. Il sent
un picotement sur sa peau sensible, une chaleur électrisante lui réchauffe les
muscles. Elle est de la foudre, Wilem en était convaincu. Déjà elle est hors de
vue, elle n’a fait que passer. L’élu de l’air descendit de son perchoir sylvestre
en douceur, essayant de faire le moins de bruit possible, respectant le repos
de la nature endormie. De retour sur le sol de la foret, il lève la tête pour
observer le ciel. La nuit avait chassé le jour depuis plusieurs heures, les
étoiles illuminait la voûte céleste telles des milliers de lucioles, et vénérait
la lune, reine de la nuit. Celle-ci éclairait les sous bois de ses rayons
blanc, projetant une douce lumière immaculée. Wilem sortit de sa rêverie et
décida de suivre la jeune femme, plus par pulsion que par réelle curiosité.

La poursuite, si l’on peut nommer cela de cette façon, ne dura pas plus de
quelques minutes et bientôt, le jeune homme n’entendit plus le bruit régulier
de pas devant lui. Il s’avança encore un peu et découvrit la belle debout, au
milieu d’une clairière entourée de cerisier fleuris, qui regardait fixement
dans sa direction. Les joue de Wilem devinrent écarlate de gêne, il réussit
tout de même à bafouiller quelques mots.

- Euh…belle nuit n’est-ce pas ?

Sakura n’avait pas encore remarqué la silhouette qui se déplaçait devant elle. Elle avait fermé ses yeux, levé la tête, bercée par le vent qui faisait bouger ses longs cheveux roux derrière elle, dévoilant une longue cicatrice qui parcourait sa carotide. Une cicatrice qui datait, maintenant, mais qui lui avait été bien douloureuse. La jeune adolescente se souvenait encore de la lame brillante fendant l’air avec un désagréable bruit sifflant, avant de s’enfoncer dans sa gorge, tracer une courbe indécise qui griffa la veine la plus importante de sa physionomie. Elle avait saigné doucement, au début, puis un flot de liquide rouge, fluide, avait commencé à tâcher sa peau, puis ses vêtements. Elle s’était évanouie. Elle avait frôlé la mort. L’amnésique dirigea une main vers cette cicatrice, la caressant du bout des doigts, comme si elle craignait de raviver cette douleur poignante.

Et puis soudainement, elle ouvrit ses paupières, dirigeant son regard d’un gris argent vers la personne qui se trouvait en face d’elle, à quelques mètres. Il était dans le rayon de lune, elle le dévisagea d’une façon peu commode. Il était grand, de taille, puisqu’elle était petite, et semblait être du même âge qu’elle. Et puis…et puis il y avait cette aura fraîche qui se dégageait de lui. Une sorte de brise étrangère à celles poussées par le vent de la nature. Et elle su immédiatement qu’il était un élu de l’air. Sans aucun doute possible. Le sourire de l’amnésique avait disparu, désertant son visage devenu d’une tristesse effroyable, presque enfantine. Les yeux noisette de l’inconnu brillaient sous la lueur de la lune, elle su y lire une sorte de gêne. D’ailleurs, il était devenu blême, comme si le fait de l’avoir dérangée le perturbait vraiment. Sakura ne bougea pas d’un pouce. Une pétale rose s’éleva à côté de son visage, effleurant sa peau. Elle tendit sa main, y recueillit la parcelle de plante qui s’était échappée d’un cerisier.

"En effet…"

Elle se tu, redirigea ses yeux vers le lac immatériel qui peignait le ciel, brillant de par les astres qui le constellait. La fleur toujours dans ses mains, elle sembla se déconnecter de la réalité, oublier la présence pourtant évidente de l’inconnu. Elle pensait, elle rêvait, elle se perdait dans cette immensité qui faisait pétiller ses yeux d’un étrange espoir, d’une sorte de bonheur évasif. Oui il avait raison, cette nuit était belle, la plus belle de toutes. La lune se dévoilait entièrement, et Sakura pouvait y puiser toute l’inspiration dont elle avait besoin pour rêvasser, pour rester dans son ‘lunatisme’ constant. Elle ressemblait à une petite fille, enfouie dans une robe de soie rose et noire qui ne la réchauffait pas. L’adolescente frissonna, revint à elle.

"Qui êtes-vous… ?"

C’était la seule question qui lui effleurait l’esprit, à cet instant précis. Elle ne savait pas quoi dire d’autre, et une once mal à l’aise l’envahie soudainement, lui faisant oublier son froid. Elle fixa à nouveau la lune, évitant, cette fois-ci, de regarder l'inconnu.

Invité

Wilem s’étrangla presque devant la
parfaite beauté de son interlocutrice. Son visage triste et pathétique était
encadré d’une magnifique cascade de longs cheveux roux très clair. Sa moue
malheureuse donnait à ses trait un air irrésistible. Ses profonds yeux, plus
gris que verts, donnait des frissons au jeune élu de l’air. Ils semblaient du
même âge, bien que la jeune fille paraissait plus mûre. Un robe noir de jais
dessinait ses gracieuses courbes que sa veste en soie rose ne pouvait
dissimuler. Jamais Wilem ne s’était sentit aussi gêné devant une personne du
sexe opposé. Des sentiments contradictoires se livraient une bataille
titanesque dans sa tête, il en attrapa une soudaine migraine.

Il s’aperçut que sa bouche était grande ouverte et, avant
qu’un filet de bave s’échappe, il la referma avec force, se faisait mal à la
mâchoire par la même occasion. Une chaleur étrange le parcourut, un énergie
nouvelles s’emparait de lui, faisant vibrer chaque parcelle de son corps. Son
esprit était en ébullition, telle une déesse antique, cette jeune fille l’avait
complètement envoûté. Aussi loin qu’il remonta dans ses souvenirs, jamais de
tels instincts ne s’était dévoilé avec une telle force. Son cœur battait si
vite que ses côtes en tremblèrent, le désir lui brûlait les muscles et se
sentait près à éclater.

Puis la belle parla de sa voix douce et claire. Une voix
n’ayant rien de particulier, et pourtant…était-ce l’amour qui lui jouait de
mauvais tous ? Etait-ce la passion qui métamorphosait chaque geste de
l’élue en une invitation à l’adoration ? Wilem se maîtrisa avec peine
avant que sa tête n’explose et, rouge d’embarra, il répondit à l’interrogation
de la jeune élue de la foudre.

- Qui je suis…euh…Je me nomme Wilem Kane, un élu de l’air venant
d’arriver il y très peu de temps au château. Si bien que je ne t’ai encore
jamais aperçut. Es tu aussi nouvelle que moi ?

Wilem ne comprenait pas pourquoi une simple conversation
le stressait autant. Pourquoi avait-il peur d’une réponse qui serait sûrement
anodine ? Quel sort cette élue du tonnerre lui avait-elle jeté…Etait-ce un
coup de foudre?

Sakura ne parlait plus. Son souffle était imperceptible, se mélangeait au vent : elle murmurait lentement des paroles que l’inconnu ne pouvait pas entendre. Elle semblait parler aux astres, à l’espace infini qui grandissait sous ses yeux, s’étendant jusqu’à la limite des arbres. Parfois, elle fermait les yeux, les rouvrait, comme cherchant à parler dans un dialecte qui lui était propre. Et puis dans le ciel s’ouvrit une fine faille blanche, traçant une courbe rapide entre les étoiles avant de disparaître. Une sorte d’étoile filante faite de fibres électriques nées de la clef de l’esprit de la jeune amnésique. Elle fit un vœu, même consciente qu’il n’allait jamais se réaliser. Et puis la voix du jeune homme résonna à nouveau dans son esprit, la réveillant de ses torpeurs habituelles, de ses rêveries incommodes qui déréglaient son mode de vie. Sakura le fixa à nouveau, plantant ses yeux d’argent dans ceux de l’inconnu toujours planté là, ayant passé du blême au rouge profond. Elle le trouva curieux, esquissa un vague sourire n’étant sûrement adressé que pour elle-même.

"Je suis nouvelle aussi."

L’adolescente caressa de son pouce le pétale qui reposait dans sa main, lové dans le creux de sa paume. Elle l’estima quelques instants. Et puis elle reprit la parole, toujours de cette voix posée et calme qu’elle arborait à chaque fois qu’elle ne connaissait pas quelqu’un.

"Je suis Sakura Eïrys, élue de la foudre, ravie de te connaître…"

Une sorte de sincérité s’élevait de ses paroles. Il était vrai qu’elle était bien contente de faire une nouvelle connaissance, car même si elle aimait énormément la solitude, elle ressentait souvent le désir d’être auprès de quelqu’un. Et puis, maintenant qu’elle était arrivée sur Shima, elle n’avait plus d’amis, plus de connaissances. La peur se mêlait à ses pensées lorsqu’elle songeait aux autres élus résidant à l’académie, et qui avaient quittés Tara tous en même temps pour se diriger ici, avec une sorte de solidarité auquel elle, Sakura, n’avait pas eu le courage de participer.

"J’aimerais tellement savoir…pourquoi la nature est en colère contre moi, ce soir…"

Elle murmurait pour elle-même, les yeux rivés sur le pétale qui s’échappait de sa paume, embarqué par une rafle de vent froid ayant gelé le sang de l’élue. Le temps se faisait insistant, plus rageux, cherchant probablement à la faire fuir de ce rayon de lune, de cet endroit, où elle n’avait probablement pas le droit d’être. Une petite larme s’écoula sur sa joue, parcourant le bord de sa lèvre avant de s’écraser sur le sol herbeux. Et puis elle redirigea, une fois de plus, son regard sur la lune. Comme elle l’avait murmuré, elle ne savait pas pourquoi la nature était en colère contre elle. Elle ne savait pas, elle ne savait plus…

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La pétale qu’elle tenait tendrement dans
la paume s’enfuit de son refuge, poussée par le vent froid de la nuit. Une
larme coula sur la joue de Sakura, elle roula sur ses lèvres et plongea vers le
sol obscur. Wilem prit d’une soudaine empathie, murmura une phrase inintelligible sans s’en rendre vraiment compte. Un brise tiède et agréable se mit à souffler dans le sens inverse du
vent glacial nocturne. Le zéphire chaleureux surpassa bientôt la puissance de
cette bise glacée et la pétale n’ayant pas encore atteint l’humus forestier,
s’envola de nouveau dans la direction de la jeune fille. Elle se posa
doucement dans la paume toujours ouverte de l’élue qui regardait tristement la
lune.

- Je ne connais pas tes malheurs, je ne peux sûrement même pas
imaginer leur portée, mais sache que tu n’es pas seul. Comme moi, les élus de
Shima Andoru t’ont accueillis, comme moi il t’ont promis amitié et chaleur. Ne
rejette pas leurs présents, tu n’es pas seul, si tu veux te confier, si tu as
besoin qu’une personne t’écoute, n’oublie pas que nous somme tous là… n’oublie
pas que je suis présent.

Les mots s’était enfuient de la gorge de
Wilem sans que celui-ci y ait réfléchit avant. Lui, pourtant de nature
solitaire et asocial, avait énoncé ses mots avec une telle assurance qu’il se
surpris lui même. Tous avait connu des malheurs, le jeune homme avait pleurer
plusieurs fois la perte de son père adoptif depuis qu’il était au château.
Cependant, il ne pensait pas éprouver la même sorte de tristesse que son
interlocutrice. Elle semblait souffrir d’un mal dont elle ne comprenait pas le
sens, sa larme était plus une larme d’incompréhension que de rage. Son regard en disait long sur ses sentiments…Wilem refoula les pleurs qui lui montaient aux yeux dû à son inhabituelle empathie
envers l’élue.

Il regarda a son tour la voûte céleste, toujours
impressionné par cette puissance que dégageait l’astre lunaire. Alors que
l’obscurité menaçait de tout envahir, la reine de la nuit venait redonner un
semblant de vie à l’univers, berçant de ses doux rayons immaculée la mère
nature. Wilem se plaisait à penser que chaque nuit était une bataille
titanesque entre les ténèbres nocturnes et les armées de la lumière. Il
s’imaginait de grande bataille entre les étoiles essayant de brillé d’une
lumière d’espoir et l’obscurité qui voulait les engloutir.

Puis son regard retomba sur les courbes élancée de Sakura…ce soir, c’était
elle la reine de la nuit…

Sakura sentit lentement une brise agréable frôler sa peau. Une brise différente des autres, plus chaude, plus chaleureuse. Une brise qui cassait le froid de la nuit, qui s’opposait au vent avec une force incroyable. Inconsciemment la jeune fille dirigea ses pupilles claires vers Wilem, l’observa quelques instants. Elle devina que cette force venait de lui. Et ce geste lui réchauffait à la fois chaque parcelle de sa peau, mais également son cœur, embaumé par cet élan de gentillesse. Elle vit alors la pétale revenir lentement dans sa paume, se déposant avec une douceur toute définie dans le creux de sa main restée ouverte vers le ciel. Sakura sentit sa gorge se nouer douloureusement sous le poids des mots prononcés par le jeune homme. Elle sentait que des larmes cristallines s’écoulaient sur ses joues, créant des effluves brillantes sur son visage pâle. Elle essuya d’un geste de la main rapide, se trouva vraiment pitoyable. Mais il était vrai qu’elle n’avait pas pleuré depuis des lustres, et le fait de se laisser aller semblait lui faire plus de bien que de mal.

L’amnésique ne su quoi dire. Elle restait silencieuse, ne bougeait pas, se contentait de fixer la pétale d’un rose pastel adorable. Une pétale de cerisier. Son propre prénom signifiait Cerisier, et elle ne su pas si le fait de s’être arrêtée au cœur d’une clairière entourée de ces arbres était une coïncidence. Elle frissonna, savourait inconsciemment la chaleur agréable des brises envoyées par Wilem. Elle prit la parole, d’une voix saccadée par sa gorge nouée qui l’empêchait de parler correctement.

"C’est vraiment…vraiment gentil…Je…Merci..."

Sakura laissa une perle d’eau s’écouler de son œil, être cueillie par la pétale qui l’absorba en devant brillante, comme si la rosée l’avait subitement assaillie. Elle se demanda un instant si le jeune homme avait raison, si il pensait réellement ce qu’il venait de dire. Mais après tout, peut être était-ce elle qui se torturait pour un rien. Elle était sûre et certaine qu’elle n’était pas la seule à souffrir du même mal, mais le regret et le refus de croire en elle n’arrivait pas à s’échapper de sa tête. La jeune amnésique regarda Wilem, et toute sa tristesse pouvait se lire sur les traits de son visage. Elle ne savait quoi dire, elle était tétanisée par la gentillesse de ses mots.

Invité

Les joues de Wilem qui avaient retrouvés
une pigmentation à peu près normale, avait soudainement revirées au rouges à la
suite des paroles, pourtant anodine, de Sakura. Sa voix créait en lui une vague
de sentiments plus fabuleux les uns que les autres. Des sensations telles qu’il
n’en avait encore jamais éprouvées. L’amour empoignait son cœur dans un étau
dont il était impossible de s’échapper. La passion martyrisait l’intérieur de
son crâne, le frappant aussi puissamment qu’il était possible de le faire. La migraine
envahit son esprit et ses jambes ne soutenait presque plus son poids. Ses yeux
se voilèrent d’un drap immaculé, rendant son environnement flou. Ses muscles se
raidirent, son esprit dériva…il fit un pas en avant.

Elle avait pleurer, son âme ne le supportait pas, ce n’était
plus lui qui contrôlait son corps mais ses instincts, ils l’obligeants à
avancer vers la désirée. Wilem ne voyait plus rien, ses pas étaient
approximatifs mais il ne tombait pas. Son enveloppe charnelle agissait
séparément de sa volonté propre. Bien qu’allez vers elle était son désir le
plus profond, sa timidité l’aurait habituellement empêcher de progresser. Son
corps était le plus fort, il marchait toujours, se rapprochant de plus en plus
de l’élue de la foudre.

Il la prit dans ses bras. Il la serra tendrement car il ne
pouvait à présent plus reculé. Son esprit redevint clair et il réfléchit à la
portée de cet acte. Elle allait peut être répondre à cette marque d’affection,
elle allait sûrement le repoussé. L’angoisse raidit ses muscles et c’est à ce
moment qu’il perçut le parfum envoûtant de la jeune fille. Une odeur douce et rafraîchissante
qui invitait au désir. Il sentait ses cheveux soyeux caresser son visage son corps
menu contre le siens…il était heureux comme jamais il ne l’avait été.
Il savait que cette étreinte ne durerais sûrement pas très longtemps car
il pensait vraiment qu’une aussi belle femme ne pouvait être sans attache
amoureuse. Il était certain d’arriver trop tard, un autre avait sûrement
conquis son cœur bien avant lui. Mais peu lui important, il se laissa aller au
moment présent, sachant pertinemment que si elle le repoussait, il n’éprouverait
jamais plus de telles sensations.

Sakura restait les yeux rivés vers Wilem, n’osant dire quoi que soit. Les mots étaient figés dans sa gorge, et étrangement elle se sentit gênée. Elle détourna ses pupilles, à nouveau vers le ciel peinturé d’un noir profond. Elle y faisait apparaître, de temps à autre, des ‘étoiles filantes’ faites d’électricité, qui fendait l’air rapidement, laissant parfois des traces de leur passage : des sortes de petites failles colorées qui s’estompaient doucement, selon l’envie de l’amnésique qui les regardait, cherchant sûrement à y puiser une inspiration. Mais elle n’y trouva rien qu’un ennui inhabituel, sûrement arrivé là parce qu’elle n’avait plus de moral, que la déprime s’était emparée d’elle brusquement.

Elle entendit craquer les branches. Au départ, elle cru que c’était le jeune homme qui partait : ce qui aurait été parfaitement logique puisqu’il était sûrement ennuyant d’être en compagnie de quelqu’un qui ne parle pas. Il avait peut être deviné qu’elle était bavarde de nature, et que le fait de se taire continuellement le frustrait. C’était idiot. Il fallait qu’elle arrête de cogiter. Lorsqu’elle releva ses yeux argentés vers Wilem, il était déjà proche d’elle, la serrait dans ses bras d’une manière tendre qui la fit frissonner. Elle ne dit rien, se demanda un instant pourquoi il agissait ainsi. Mais sa présence lui semblait réconfortante, agréable. Cet élan de douceur l’émue, si bien qu’elle ne pu s’empêcher de libérer toutes les larmes qu’elle s’efforçait de contenir depuis sa rencontre avec l’élu de l’air. Elle se sentit ridicule, s’abandonna contre le jeune homme d’une manière un peu épuisée, comme s’il étanchait l’angoisse qui lui pesait sur les bras depuis des années et des années. Puisqu’il était plus grand que lui, elle ne pu que déposer son visage contre son torse, laissant aller les larmes qui s’écoulaient très vite sur ses joues. Elle agissait contre sa volonté, si elle avait gardé tout son sang-froid, si elle avait gardé toute sa sagesse, il aurait été probable qu’elle ne se laisse pas aller à des élans de tendresse, à ces sentiments confus qui se battaient dans son esprit.

"Pourquoi...?

Sakura se sentait vraiment pitoyable, pathétique. Elle devait sûrement se parler à elle-même, se demander pourquoi elle nourrissait une telle haine pour sa personne. Bien qu’elle n’aimait pas pleurer devant quelqu’un, elle semblait se libérer d’un fardeau. Le fait de sentir Wilem contre elle, d’entendre son cœur battre à tout rompre, de savoir que ce geste devait sûrement confirmer ses dires, elle se sentait rassurée. Protégée. Pas encore libérée de ses regrets, mais une partie de haine contre elle-même semblait s’être envolé temporairement. Elle devinait dans les gestes de l’élu un tendresse amoureuse, mais elle n’eu pas le temps d’y réfléchir, elle s’enivrait de sa chaleur, essayait d’arrêter les pleurs qui s’entêtait à brouiller ses yeux d’argent, les rendant encore plus brillant sous la lumière tamisée de la lune.

Invité

Tel un hommage divin, la lune éclairait de
ses doux rayons immaculés les deux être enlacés au milieu des bois de l’île
volante. La nature environnante s’était tut, plus aucun bruit ne s’échappait
des sombres sous bois. L ‘on aurait dit que la force de volonté des deux
adolescents avait interrompue la course du temps, que celui-ci, pour rendre ce
moment solennel, s’était figé. Une étoile étincelante traversa l’obscure voûte
céleste, seul mouvement dans ce paysage immobile. Le centre du monde semblait
s’être déplacer au cœur des forêt de Shima, précisément au milieu d’une
clairière entourées de cerisier fleuris de pétales roses pâles. Puis la courbe
du temps reprit sa course…

Une brise froide vient frapper Wilem dans le dos, le glaçant
jusqu’au sang, un nuage cacha l’astre lunaire, privant la terre de toute
lumière. Le vent glacée devint de plus en plus violent, un crachin commença à
chuter du ciel. Ce mince rideau d’eau devint rapidement une averse brutale et
désagréable. Un éclair déchira soudainement les nuages, suivi presque
immédiatement d’un puissant coup de tonnerre
ébranlant les arbres de ses vibrations. L’élu de l’air profita de ces
changements météorologique pour se réveiller de sa douce torpeur amoureuse. Pendant
un long moment, il n’avait plus eut conscience de son environnement, la seule
chose comptant pour lui étant sa dulcinée blottit dans ses bras puissants.

Exaspéré par les éléments décidément cruel, il se recula
lentement, quittant l’étreinte de la belle. Avec tendresse, il saisit sa fine
main froide et l’éloigna du centre de la clairière. Arrivés près du tronc du
cerisier le plus imposant, Wilem fit signe à Sakura de ne pas bouger. Une fois
de plus, ses yeux furent recouvert d’un voile blanc translucide et de grandes
ailes angéliques jaillirent dans son dos. La volonté de l’élu envahi les lieux
et bientôt, le vent se mit à tourbillonner autour d’eux, il se fit aussi plus
chaud et réconfortant. Le dôme élémentaire se forma doucement, un bouclier
d’air aussi infranchissable pour la tempête que le serait un mur de pierre pour
un insecte. Large d’a peine quelques mètre et pas assez haut pour qu’un homme
se tienne debout, les deux élus durent s’adosser à un arbre pour ne plus être
victimes des intempéries.

Le jeune homme était encore sous le choc de son étreinte
avec l’élue de la foudre. Il essayait de mettre de l’ordre dans ses sentiments,
refoulant les sombres pensées pour uniquement se concentrer sur la joie qu’il
ressentait à se trouver près d’elle en ce moment. Il s’exclama d’un voix claire
ou le gêne était presque tangible.

- Je pense que le mieux serait de rester là jusqu'à ce que la
tempête se calme…bien entendu je ne t’oblige pas, tu es libre de vouloir
retourner au château malgré la météo.

Wilem rougit et pria les dieux pour que la
réponse de Sakura fut de rester avec lui. Bien qu’il ne connaissait pas encore
les sentiments qu’elle éprouvait pour sa personne, il ne voulait pas encore en être
séparé.

La pluie commençait à tomber lentement, et lorsque Sakura leva ses yeux larmoyants elle pu constater que les nuages avaient reprit une place bien importante dans le ciel, couvrant en partie les étoiles et la lune. Un vent froid avait remplacé les brises chaudes envoyées par Wilem, si bien qu’elle frissonna plusieurs fois en baissant les yeux pour ne pas recevoir les gouttes gelées qui arrivaient de plus en plus vite, et de plus en plus nombreuses des nuages grisâtres. Elle n’aimait pas les temps pluvieux, même si le son particulièrement violent de l’orage lui plaisait. La tempête était en train de reprendre le dessus, et la jeune femme se maudit un instant de son étourderie, elle aurait mieux fait de rester planquée dans l’internat à regarder la pluie cingler les vitres, trancher l’air. Oui mais…Elle n’aurait pas rencontré l’élu de l’air. Et quelque part, même si elle ne voulait pas l’admettre, sa présence réconfortante et chaleureuse lui était agréable. Sakura se laissa entraîner vers le cerisier le plus proche pour ne plus être sous les coups de l’eau.

Et puis elle fixa le jeune homme avec un air fasciné, regardant les ailes qui étaient apparues dans son dos, puis le dôme tiède qui les entourait pour les protéger des intempéries. Mais l’orage, quant à lui, était plus fort, plus sonore, semblait même se ficher des deux jeunes adolescents cachés sous une protection d’air chaud. Le son aurait pu couvrir leurs paroles, et brusquement Sakura fut furieuse. Elle se demandait pourquoi le temps était si fâché, et était persuadé qu’il venait dans le but tout précis de venir déranger la jeune amnésique. Ou peut être raviver des souvenirs qui lui étaient douloureux. Un instant elle pensa à son chat, probablement figé sous une chaise, sous un meuble, à miauler à la mort comme un animal perdu qui à déjà connu la foudre d’une manière peu commode.

L’adolescente se décida alors, à son tour, d’invoquer ses pouvoirs, comme l’avait fait Wilem. Ses yeux se mirent à briller, leur couleur ressemblant à de l’argent fondu qui faisait pétiller son regard d’une certaine colère. Deux très grandes ailes se déployèrent avec une force haineuse, traversant le dôme du jeune homme sans pour autant le détruire. Aussitôt il n’y eu plus un son : seulement ceux des arbres, de la forêt. Les sons normaux. L’orage se faisait moins insistant, se contentant de colorer le ciel de flash lumineux. Seule la pluie substituait, se frappant au bouclier pour que leur trajectoire soit changée. Sakura redevint normale. Les ailes disparurent aussitôt qu’elles se furent rangées dans son dos, laissant un vague halo gris et violet. Elle repensa subitement à son ancien statut de conseillère divine de la foudre, qui, étrangement, ne lui manquait pas.

"Je suis plus à l’aise…ici."

Elle répondait d’une voix peu joyeuse à ce que venait de dire le jeune homme. Elle repensait également à leur étreinte, qu’elle avait particulièrement aimée, sans vraiment comprendre pourquoi. Mais elle ne prit pas le temps de réfléchir. La seule chose qu’elle savait pour l’heure, c’était qu’elle se sentait bien aux côtés de Wilem, qu’il avait quelque chose d’étrange qui la rassurait, qui lui donnait une sensation de protection et de bien-être. Sakura le regarda, son teint avait viré une fois de plus au rouge. Et puis un petit sourire illumina brusquement son visage. Petit, certes, mais il était là.

Invité

La tempête faisait rage au dehors du dôme
magique. Wilem l’observait, défiant les éléments de venir perturber cet instant
solennel. Il avait sommeil, toutes ses émotions l’avait vidé de ses forces et
ses yeux ne resteraient indéfiniment ouverts. Son regard pivota vers Sakura
assise a quelques centimètre de lui. Ses traits avait sensiblement évolués,
elle n’était plus la jeune adolescente infiniment malheureuse qu’il avait
rencontré quelques minutes auparavant. Elle était maintenant plus épanouie, pas
heureuse, mais mon renfermé, comme si un poids l’avait en parti quittée. Wilem
se mit à rêver qu’il était l’une des cause de cette métamorphose, il espérait
du fond du cœur avoir servit à quelque chose dans ce changement positif…bien
qu’il n’y croyait pas trop.

Le jeune homme avait de tout temps été d’un pessimisme rare,
voyant le vice partout. Doué d’une empathie naturelle qui lui avait fait
ressentir l’aspect pernicieux de l’homme, il ne croyait donc plus en celui-ci.
L’homme à oublier les plaisir primaires, il ne ait que vivre est déjà une
chance inouïe. Il veut toujours plus, il est obsédé par les biens matériels et
ne s’occupe plus des jouissance telle que l’amour ou l’amitié. Wilem savait
qu’il fallait nuancer ces propos, il avait rencontrer nombres d’humains
respectant leur vie ainsi que celles des autres, profitant de chaque instant et
ne se souciant pas ou peu de l’argent. Lui même concédait que nul homme ne
pouvait vivre à notre époque sans domicile ou besoins primaires tels que la
nourriture ou les vêtements…et pour cela il fallait gagner sa vie car rien
était donné à présent.

Cette réflexion sur la vie l’amena à penser à son
antagoniste, la grande faucheuse. Il avait lu plusieurs ouvrage relatant
diverses philosophie sur la mort. Montaigne disait par exemple qu’il ne fallait
jamais oublier sa condition fragile d’être humain, qu’il était nécessaire, si
noues ne voulons pas souffrir le jour de son arrivée, sans cesse penser à elle,
se dire qu’elle peut venir nous chercher à tout moment. D’autre prétendait que
justement car elle pouvait nous atteindre à tout moment qu’il fallait l’oublier
et profiter de chaque instant que nous donnait la vie. Ces raisonnement
permirent à Wilem de rester éveiller, sans s’en rendre compte, il avait passé
un bras autour des épaule de sa dulcinée…encore un geste impulsif indépendant
de sa volonté. Après tout, cela ne signifiait rien, un geste affectif, rien de
plus.

La nuit passait lentement, rythmée par les coups de tonnerre dont la
puissance sonore était réduite par le bouclier des deux magies combinées des
élus. Bien que déterminé à resté éveillé, l’adolescent ne put réprimer les
coups de boutoir incessants de la fatigue qui le sommait de s’endormir. Le
monde des rêves l’appelait et il ne put résister bien longtemps. Doucement, ses
paupières se fermèrent et Wilem plongea dans un autre univers, féerique et
passionnant.

La nuit pesait désormais sur les deux jeunes élus, enfermés dans un dôme qui les protégeait de l’orage et du temps désagréable qu’il régnait au dehors. Le vent s’abattait contre les parois de cette bulle d’air tiède, la pluie les giflait, et tous ces bruits résonnaient comme une berceuse dans la tête de Sakura, dont les yeux fatigués fixaient les arbres secoués. Elle n’aimait pas ces rafales violentes qui déracinaient les fleurs, qui gênaient la végétation de la forêt. Un très mauvais souvenir lui revenait toujours lorsque le temps se décidait à se mettre dans une vive colère, pareille à celle dont il était assailli cette nuit là. Un souvenir brutal, encore flou, qui apparaissait devant ses yeux comme un voile noir, puis comme une sorte de défilement d’images qui lui avaient été, jadis, incompréhensibles. Des images d’appareil photo, des images parfois animées, des sons effrayants.

L’adolescente se revoyait encore devant la grande fenêtre en verre qui donnait sur un large jardin de pelouse verte et naturelle, sur les falaises dont les flancs étaient frappés par la mer. Il y avait toujours eu cette odeur de sel séché, chez ses parents. Du sel qui, lorsque Sakura prenait l’habitude d’aller se promener avec son père, se déposait sur son visage. Elle aimait alors s’humecter les lèvres, sentir ce goût naturel qui provenait tout droit de la mer. Elle se souvenait avoir été heureuse. Et puis elle avait vu, dehors, le temps se dégrader, l’orage arriver comme un ouragan. Elle était restée plusieurs heures à regarder la pluie, les yeux dans le vide, jusqu’à ce qu’elle voit son chat, planqué sous une tôle, à miauler à la mort, les oreilles couchées et le poil trempé, sale. Elle avait accouru auprès de lui, et dès que sa main avait frôlé le métal, elle était tombée, comme une masse de chair inerte, dans la boue. Comme morte. Touchée de plein fouet par un éclair qui avait été malencontreusement attiré par cette bande de fer si alléchante.

Sakura sortit de sa torpeur en sentant le bras de Wilem se glisser sur ses épaules, dans un geste qui sembla la calmer de ses émotions, si brutalement parvenues à elle, dans un relent de souvenirs désagréables. Elle soupira légèrement, détourna les yeux pour fixer le jeune homme qui, peu à peu, sombrait dans un sommeil calme. A son tour elle bâilla, frissonna, sentit que la fatigue engourdissait ses muscles, faisait tomber ses paupières contre sa volonté. A en voir l’emplacement de la lune, il devait être au moins une heure du matin, voire même plus. Si bien qu’elle se sentit soudainement plus épuisée que d’habitude : peut être était-ce le fait d’avoir invoqué ses pouvoirs si vite, sans s’être entraînée depuis des mois et des mois. Ou peut être était-ce psychologique. De voir le noir tomber sur le jeune homme et sur elle pesait sur ses épaules, l’obligeait à fermer les yeux pour ne les rouvrir que le lendemain matin.

La jeune amnésique se laissa aller contre Wilem, ferma les yeux. Etant ainsi contre lui, dans une sorte d’étreinte involontaire, elle se sentait bien. Elle savait qu’elle pouvait dormir sans craintes d’être réveillée par ces immondes cauchemars qui survenaient chaque soir, une fois que le sommeil l’avait enfin assaillie. C’était un sentiment de protection très agréable, si bien qu’elle ne tarda pas à s’endormir, bercée par le souffle du vent.

Invité

L’aube se levait, célébrée par le chant
des oiseaux. L’astre solaire commença à émerger de son sommeil stellaire. Il
gravissait peu à peu la paroi de la voûte céleste, inondant par la même
occasion le monde de ses rayons chaleureux et orangés. Les feuilles des arbres
vibraient paresseusement dans la bise matinale. La tempête s’était calmé et les
nuages avaient disparus des cieux, le bleu remplaçant la grisaille oppressant
de la veille. Un écureuil sauta gracieusement d’un arbre à l’autre, navigua
aisément entre les branches de ce nouvel abris et s’arrêta un instant,
interloqué. Quelques mètre sous lui, un petit dôme, fait d’air tournoyant sans
cesse, abritait deux adolescents dormant l’un contre l’autre, chacun profitant
de la chaleur que dégageait l’autre élu. Figé par l’étrangeté de la scène, il
ne resta pourtant pas longtemps admirer le spectacle, ses instincts le poussait
à aller de l’avant.

Les paupières de Wilem tremblèrent, secouez par des spasmes
signalant le retour du monde féerique du sommeil. Ses yeux s’ouvrirent
finalement, encore recouverts par un voile de fatigue brumeux. Retrouvant peu à
peu ses sens il sentit un poids sur sa poitrine. Il baissa lentement les yeux
et découvrit le sublime visage de Sakura, la jeune élue qui l’avait envoûté hier
soir. Etrangement, il n’était plus gêné par sa présence, sa timidité envolée,
il la regardait avec des yeux ou perlait la passion. Pendant de nombreuses
minutes, il ne fit que l’observer, s’extasiant de ses traits, admirant ses
courbes et souriant bêtement comme un enfant planté devant sa montagne de
cadeaux de noël.

Il frissonna soudain et se rendit compte que c’était le froid
qui l’avait réveillé. Bien qu’il fut protéger par cette barrière magique, un
corps endormi supportait moins bien les basses températures qu’un corps en activité.
Sakura remua légèrement et Wilem se demanda s’il devait la réveiller ou pas. Il
se décida finalement et lui caressa tendrement les cheveux. Approchant son
visage du siens le plus délicatement possible, il lui déposa un doux baisé sur
le front. C’était différent de la soirée précédente ou sa volonté n’avait plus
contrôle sur son corps. Il était aujourd’hui bien conscient de ses actions et
admirait sa dulcinée émerger lentement du monde des rêves.

Avant qu’elle ouvre les yeux, il repensa à ce dôme conçut grâce à leur magie
combinée et se dit qu’il n’avait plus de raison d’être. Il murmura sa clé de l’esprit
et, se concentrant sur son pouvoir, ordonna à l’air tournoyant au dessus de lui
de cesser sa danse monotone éternelle et de continuer sa route à travers le
monde. Il vit la barrière s’évanouirent doucement, et avec elle, disparaître le
cocon chaleureux dans lequel les deux jeunes élus avaient passé une nuit
paisible dont le cauchemar avait été bannie.

Le temps se gâte rapidement. Il devient ténébreux, noir. Des grandes fissurent commencent à briser le ciel, à le rompre. Elle, elle s’est déjà précipitée sur la porte qu’elle ouvre avec toute sa maigre force de petite fille. Elle a vu le chat noir sous la tôle, et elle l’entend miauler même si une grande vitre la sépare de lui. La pluie tombe sur elle alors qu’elle cours dehors, ses pieds nus pataugeant dans la terre transformée en boue qui salie ses chevilles, rend difficile sa progression. Mais elle continue, elle voit le chaton feuler d’angoisse, griffer le sol de ses pattes tremblantes, ce qui la rend folle d’inquiétude. Elle arrive enfin. Elle porte une main sur l’animal, l’attrape par la peau du cou avec une douceur extrême, et de sa main libre elle soulève la tôle. Elle ne sent plus ses membres. Elle sait qu’elle à lâché le chat, qu’il s’est réfugié contre elle, parce qu’elle sent sa chaleur sur son ventre. Son bras lui fait mal, il saigne. Elle gémit parce qu’elle souffre. Il lui semble que quelque chose s’est infiltré dans son corps…

Sakura bougeait dans son sommeil, agitée par un cauchemar qui était finalement survenu peu de temps avant son réveil. Lorsqu’elle sentit une main lui caresser les cheveux doucement, puis que quelqu’un l’embrassait sur le front avec une douceur incroyable, elle ouvrit lentement les yeux. La lumière qui venait du soleil envahi alors brusquement ses pupilles, lui donnant la désagréable impression de devenir aveugle. Si bien qu’elle ne se rendit pas compte immédiatement de la proximité qui s’était établi entre elle et Wilem. Alors elle étendit les bras, comme un félin, et les replaça contre elle en se blottissant contre ce qui lui semblait être un lieu pour dormir vraiment agréable, dans l’espoir de réchauffer son corps encore engourdi par le froid. Et puis elle ouvrit une fois de plus les yeux, cette fois-ci sans craindre qu’un rayon ne se perde dans la profondeur de son regard : elle s’était habituée à la luminosité qui régnait dans la forêt. Même si celle-ci était faible, elle contrastait beaucoup avec la nuit.

Ses yeux argentés tombèrent directement dans le regard de Wilem, et elle se souvint alors de la nuit qu’elle avait passée avec lui. Un début de nuit qui lui avait été douloureux, et cette souffrance avait été étanchée par l’élu de l’air, apparu si soudainement dans son existence qu’elle rougi de se savoir dans ses bras, de savoir qu’elle avait dormi contre lui pendant plusieurs heures, tout en éprouvant une sorte de réconfort. Elle murmura, dans un souffle léger, un bonjours. Et alors elle se rendit compte que le dôme avait disparu, et que la tempête avait laissé place à un ciel bleu pâle, et où les étoiles disparaissaient peu à peu. Le froid matinal caressait sa peau d’une manière plus tendre que lorsqu’il s’agissait du vent désagréable de la nuit, et elle se sentit soulagée de ne plus voir les éclairs zébrer le ciel, de ne plus entendre le vent battre les arbres avec férocité. Sakura frissonna, se rendit compte que son visage était bien proche de celui de Wilem. Elle baissa un peu la tête, bâilla de toute son énergie mais ne chercha pas à se détacher de l’élu.

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