Une lumière avant l'ombre

Une lumière, un paysage, un château. C'était ce que Vika pouvait voir avec sa vision floue, vacillante et approximative. Elle marchait comme elle pouvait, ne comprenant même pas ce qu'elle faisait. Tout s'embrouillait dans sa tête, sa pensée n'était pas encore claire. Après avoir perdu connaissance dans le vaisseau, Vika s'était réveillé au milieu de débris et de corps. Elle en voyait qui s'en s'enfonçait vers la forêt, se demandant elle même ce qu'elle faisait la. D'après ce qu'elle pouvait juger, elle avait survécu à un crash. Mais d'où venait-elle ? Où est-ce qu'elle allait ? Où était-elle ? Toutes ces questions mais une seule avait perduré dans sa tête : qui était-elle ?

Avant de se lever, toutes ces questions se baladaient dans son esprit. Mais dès qu'elle s'était levée, son esprit s'était embrouillé et elle commençait à perdre connaissance. Marchant tant bien que mal, mettant un pied devant l'autre comme elle le put, elle s'était dirigé vers un grand batiment qu'elle pouvait voir. Il y avait une grande porte. Une fois arrivé à celle-ci, elle tomba de tout son poids dessus et la porte s'ouvrit, délivrant le corps de Vika dans le grand hall, attirant le regard de dizaines de personnes.

Le soleil couchant baignait les bois d'une douce lumière orangée. Un vent frais balayait la cime des arbres. Pourtant, une atmosphère pesante régnait autour du château. Pas un oiseau ne laissait ses cris troubler le silence inquiétant. Seuls les craquements des graviers restaient audibles.
Jude revenait vers l'Académie, après un début de soirée si tranquille, contrairement aux deux précédents jours qu'elle avait passé sur l'île. La tête haute, un éclat rougeoyant dans ses pupilles encre. Elle souriait, sadique, devant la silhouette titubante qui marchait également en direction du château.
Elle arrivait à hauteur de la porte, quand la femme qui allait devant elle s'écroula sur le sol. Jude manqua d'éclater de rire, mais, voyant les regards inquiets des quelques élèves qui étaient dans le hall, elle préféra éviter.
Elle jeta un coup d'oeil à la femme inerte sur le sol, et la frappa du pied, pour la réveiller, en vain. Cependant, elle eut droit aux regards outrés des autres académiciens, devant ce manque de douceur flagrant, ce qui lui arracha un sourire qui se voulait discret. Puis elle referma la porte, ce qui acheva de pousser le corps dans l'entrée.
D'un autre coup de pied, elle retourna le corps dos au sol, et s'aperçut avec surprise que la femme devait être bien plus agée qu'elle. Elle lança un regard plein de dédain vers les vêtements de la femme, oubliant un instant qu'elle aussi n'était pas vraiment habillée de façon très décente.

Le corps inerte gisant au sol avait eu droit à deux ou trois coups de pieds, d'après ce que Vika aurait pu sentir. L'esprit encore moins claire qu'au début, elle avait senti les coups froids et sec contre sa peau, comme si elle était morte ou qu'elle était un gibier qu'on vérifié si il était bien mort.

La porte se referma sur elle, la faisant entrer de tout son corps. Après s'être fait retourner une vive lueur l'aveugla. Le plafond reluisant de la grande salle illuminait Vika. Pour se protéger, elle mit ses mains devant ses yeux qui étaient déjà plissés. Mais cela ne suffisait pas. Cette lumière n'affectait pas seulement ses yeux, mais aussi tout son corps frémissait, subissant la lourdeur de la vive lumière. Rassemblant toutes ses forces, Vika se retourna sur elle même pour essayer d'échapper à la lumière. Lorsqu'elle se retourna, elle put apercevoir des pieds devant son visage. Derrière ces deux jambes, Vika pouvait apercevoir une grande salle avec des piliers massifs, ainsi que des étudiants qui la regardaient avec frayeur, curiosité, certain avec dégoût, d'autres avec pitié. Des murmures se firent entendre et les élèves commencaient peu à peu à se rapprocher du corps.

Jude restait penchée, de haut, sur le corps. Elle assistait, en spectateur sadique, à l'effet de la lumière sur cette élue de l'Ombre. Autour d'elle, d'autres élèves se groupaient, curieux, devant une telle bête de foire.
L'élue de la Terre se sentit poussée en arrière, malgré sa volonté. Alors, pour satisfaire sa simple fierté, et de quelques coups habilement mis, elle refit surface dans cette masse grouillante, attrapa le bras de la femme et cria avec autorité:
- Bon, dégagez, là, m*rd*! J'm'en occupe !
Et, poussant et frappant, elle tira le corps vers un coin plus tranquille. Elle n'avait pris aucunes précautions, et des griffures sanglantes s'étalaient maintenant le dos de la femme. Le peu de douceur dont elle faisait preuve indigna les élèves, mais qui ne protestèrent pas plus longtemps et s'écartèrent.
Evidemment, Jude ne ressentait aucune sympathie pour cette élue, et si elle faisait mine de vouloir lui apportait de l'aide, c'était simplement parce que l'aura que dégageait la femme semblait puissant et sauvage. Une alliée de poid, pensait-elle, et si elle parvenait à l'amener jusqu'à Noah, elle deviendrait une force.
Elle fit l'effort de se baisser et de secouer la femme, afin de la réveiller, au lieu de lui asséner un coup dans les reins, ce qu'elle aurait fait volontiers si elle ne craignait pas de subir les reproches des autres et l'anthipathie de la nouvelle venue.

Comme si elle ne souffrait pas suffisament, la propriétaire des pieds que Vika avait vu ne s'était pas gêné pour attraper à pleine main le bras du corps gisant à la porte du hall. Se sentant tiré, la peau se faisant griffée par les dalles du sol et par les griffes de celle qui la tirait, Vika finit sa pénitence le dos appuyé contre un mur froid, loin de l'attroupement qui s'était crée autour d'elle. Malgré cela, quelques regards étaient toujours fixé sur elle, d'après ce que Vika pouvait juger derrière le voile de flou devant ses yeux.

Pensant qu'elle allait enfin pouvoir se reposer, la femme sentit des bras l'aggriper violemment et la secouer sans ménagement. Toujours dans son embrouillement, Vika comprit que depuis le début, c'était la même personne qui lui rallonger son supplice. Il était tant d'y mettre fin.

Après deux ou trois secousses, une main se posa sur celle de la tortionnaire. Une main ferme et glacé qui resserait son emprise sur le poignet de l'autre jeune fille. Comme forcé de le faire, la main de sa tortionnaire s'enleva doucement du bras de Vika qu'elle avait empoigné. Une fois que la main était enlevéé, Vika donna un coup de tête à la jeune fille en face d'elle. Cette dernière tomba en arrière.

Jude secouait toujours le corps, de plus en plus fort quand soudain, la main de la femme lui attrapa le poignet. D'abord surprise, puis énervée, elle retira sa main sous la force de l'autre. Elle fut d'ailleurs étonnée de la poigne de la femme encore faible en apparence.
Elle était encore plongée dans des réflexions superficielles lorsqu'elle se prit un coup dans la poitrine, qui la fit tomber en arrière, le souffle court.
Quand elle comprit que c'était la femme qui dans un état demi-conscient lui avait asséner ce coup, elle sentit la colère affluer dans ses veines. Comment cette élue inférieure pouvait se permettre !? Jude en était carrément offusquée. Pourtant, elle parvint à se contrôler, avec le sang-froid remarquable dont elle avait toujours fait preuve. Elle ne se la cachait plus: ils auraient besoin de cette guerrière.
Sans un mot, encore trop énervée pour pouvoir masquer la colère qui pointerait dans sa voix si elle parlait, elle souleva tant bien que mal la femme, afin de l'asseoir contre un mur, se redressa et recula.
Elle souffla, se calma, ferma les yeux un long moment et voilà. Elle était de nouveau calme, elle pouvait parler.
- Ecoute, je sais que tu m'entends. Je sais pas si tu sais pourquoi t'es là mais t'as pas la forme. Faut qu'tu te lèves, j'vais t'emmener pour te soigner.
Elle avait parler d'une voix froide, en s'efforçant cependant de paraître gentille, chose qu'elle n'avait jamais été. Malgré ça, elle voyait bien que le traitement qu'elle avait fait subir à la femme ne l'aidait pas, et elle reprit, moins fort, trop honteuse d'avoir à prononcer ces mots:
- Je suis désolée pour tout à l'heure.
Elle estimait vraiment son affaire avec Noah, pour dire ça.

- je ... tu m'entends ... sais pas ... t'es là ... pas la forme ... faut qu'tu te lèves... pour ... soigner.

La tête vacillante, c'est tout ce que Vika avait pu comprendre de ce qu'elle pensait que la jeune fille devant elle avait dit. Elle n'avait pas encore récupéré tous ses sens, mais avait pu sentir de faire soulever par la même personne qu'elle venait d'attaquer. Vika savait qu'elle aurait besoin d'aide. Et d'après ce qu'elle avait pu comprendre, le jeune fille voulait l'aider. Mais pourquoi voulait-elle l'aider alors que quelques secondes avant, elle n'avait fait que aggraver son état. Vika sentait qu'elle devait reprendre les choses en main.

- Je suis certaine que tu veille m'aider...mais la, je vais me démerder toute seule, merci.

Il fallait à tout prix qu'elle se débarasse de la fille. Titubuant comme une saoule, Vika passa à côté de la fille et marcha en direction d'un escalier. Elle ne savait pas où elle partait mais devait aller loin d'ici. Elle monta les escaliers. Au bout de 10 marches, elle tomba lourdement, érintée par l'effort. Elle gisait inerte à nouveau sur les marches.

Jude recula lorsque la femme parla et se leva. Un léger sourire apparut à la commissure de ses lèvres quand celle ci annonça qu'elle allait se débrouiller toute seule. Il était quasiment impossible, même avec une carure comme la sienne, de monter les escaliers dans cet état et encore moins de trouver l'infirmerie dans le labyrinthe qu'était le château.
Malgré ça, elle laissa l'autre entamer la montée des escaliers. Mais au bout de quelques marches à peine, elle s'étala, de nouveau inconsciente. Jude fronça les sourcils et pesta, sur le point de perdre patience:
- P*t**n ! Elle peut pas accepter de l'aide comme tout le monde ! Va falloir que je la supplie en plus !
Elle resta un instant sur place, réfléchissant, exaspérée. Quand elles seraient dehors, Jude agirait mieux, au milieu de son élément.
Elle tira avec précautions le corps vers la porte, histoire de ne pas plus l'abîmer. Puis elle ouvrit la porte, laissant entrer le souffle frais du crépuscule, et posa le corps sur le seuil.
Alors, son pouvoir l'envahissant, pour la première fois dans un but bon, des racines sortirent du sol et soulevèrent la femme, dans une harmonie dirigée par sa main. Et doucement, le corps fut promené, au ras du sol, près d'un ruisseau où Jude l'étendit sur une herbe sèche et soyeuse.
A l'aide d'un grande feuille, élargie manuellement, elle appliqua un peu d'eau sur le front fiévreux de la femme. Elle avait beau être en pleine nature, dans une ambiance relativement fraiche, Jude pensait que l'air extèrieur et la nature étaient plus revigorants que l'air comprimé d'une infirmerie.
Pourtant, tout ce qu'elle faisait, ce faisait fébrilement et dicrètement, comme si Jude ne voulait être vu en pleine gentillesse.

L'air frais de dehors était de loin plus respirable que l'air renfermé du grand hall. Vika respirait à pleins poumons. Cet air si doux qui carressait son visage lui clarifia l'esprit. Elle sentait l'eau sur son front qui coulait légèrement sur ses tempes. Lentement, elle se releva. Elle était toujours assise par terre. Vika vit ensuite le ruisseau devant elle. Elle sentit ensuite l'herbe sèche et douce sous ses jambes et ses mains. Quelques secondes plus tard, elle vit la jeune fille qui l'avait martirisé quelques minutes plus tôt. Mais elle semblait regarder le paysage, assise elle aussi sur l'herbe. D'après ce que Vika pouvait en juger, c'était elle qui l'avait amené ici.

- Ecoute, je sais pas qui tu es, ni ce que tu me veux, mais merci quand même. Et désolé pour le coup de tête tout à l'heure. Je me suis sentie en danger, je voulais juste me défendre.

HRP - Désolé pour le retard. Manque de temps ^^ - HRP

Jude contemplait le réveil de la femme d'un air rêveur, absent. Elle laissait son regard courir alentours, elle était presque détendue. C'était une sensation étrange, qui n'avait jamais paru lui manquer. Elle était insensible à la douceur du monde, seulement à sa douleur et à son mal.
Elle restait perdue dans ses pensées, quand une voix la fit sursauter. Elle fixa la femme qui lui parlait, asquiessa légèrement et répondit d'une voix froide, soudain consciente de la douceur alarmante dont elle avait fait preuve:
- J'ai l'habitude. Bon, ça va ou pas ?
Elle se leva brusquement, ayant laissé la vague de gentillesse qui l'avait assaillie quelques minutes plus tôt s'échapper, plus fluide que la fumée. Elle piétina le banc de fleurs qui bordaient la rivière, sans le moindre état d'âme. Un léger éclat de haine brillait dans son regard. Elle était plus lunatique que la lune elle-même qui prenait plaisir à changer de forme chaque nuit.

hj: désolée moi aussi, mais la reprise des cours c'était pas facile

Aussi rapidement qu'elle avait reposé Vika, elle avait perdu sa douceur pour reprendre son habituel froideur et cynisme. La jeune fille s'était mis debout et écrasait des fleurs. Vika ne voulait se permettre de juger cette personne, malgré le fait qu'elle savait pertinemment qu'elle l'avait aidé par pur intérêt, et non pas par solidarité ou envie. Vika répondit vaguement, consciente que ça n'interessait pas le moins du monde la jeune fille.

- Oui, ça va, merci.

La fille continuait de piétiner les fleurs. On entendait seulement le vent. Vika resta quelques minutes là, avant de se relever. Elle était maintenant en pleine forme, à part sa mémoire qui était à jamais endommagée.

- Ecoute, je te remercie encore une fois. Mais je dois y aller.

L'amnésique s'éloigna vers le château, n'attendant pas la réponse de l'autre. En même temps, elle n'en attendait pas vraiment une.

[Sujet clos]